Tiers-lieux ou lieux 3.0 : que peuvent-ils apprendre aux marques ?

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Tiers-lieux ou lieux 3.0 : que peuvent-ils apprendre aux marques ?

La Cité Fertile (Pantin), Ground Control (Paris), Covo Velten (Marseille), Le Grand Bain (Nantes), Darwin (Bordeaux), ou encore Bliiida (Metz)… Le phénomène des tiers-lieux, aussi appelés lieux hybrides ou lieux alternatifs, est grandissant. Ils sont aujourd’hui plus de 2500 selon France Tiers-Lieux et leur chiffre ne cesse d’augmenter.

 

Acteurs politiques, culturels, économiques, sociaux, émotionnels… impossible de mettre tout le monde d’accord sur ce qu’est un « tiers-lieu »… et c’est bien là tout l’intérêt de ces espaces multiformes !

 

En observant ces lieux aux identités, ambitions et fonctions multiples, nous pouvons ainsi identifier les leviers dont les marques peuvent s’inspirer.

 

 

1. Vision de marque prospective, mais ancrée dans des besoins concrets

Par nature, les tiers-lieux sont des espaces ouverts, non-finis, en constante co-construction entre acteurs de différents horizons.

En cela, ces espaces cherchent à adopter une vision sur le long-terme, pour laisser au projet l’occasion de se développer dans toutes les directions possibles – des directions parfois imprévues.

 

Dans un même temps, ils naissent des besoins des citoyens qui sont, eux, beaucoup plus tangibles : se restaurer, se désaltérer, avoir accès à des lieux culturels, artistiques, des lieux du vivre ensemble où il est possible de se retrouver, de travailler, des lieux qui participent à créer des emplois…

 

Dans le cas du Ground Control, leur vision s’inscrit sur le long-terme car ils disent eux-mêmes vouloir « mettre les utopies à l’honneur ». Pour autant, ils le font en proposant des expériences « multiples, concrètes et ancrées ».

 

Quel enseignement pour les marques ?

Les marques peuvent s’inspirer de cette double logique. Pour établir leur plateforme de marque, il est important pour elles d’envisager le long-terme à travers une vision suffisamment ambitieuse pour rester juste et pertinente face aux évolutions sociétales.

 

Mais de cette vision doit émerger une promesse plus pragmatique, permettant à la marque de couvrir les besoins actuels de sa cible.

 

Naturalia s’inscrit déjà dans cette réflexion.

En termes de vision, la marque met en avant son esprit d’insoumission, à travers lequel elle souhaite inspirer chacun à penser les modes de vie idéaux de demain.

Cette notion d’insoumission reste au cœur de la marque, mais elle alimente sa promesse différemment selon les besoins identifiés des consommateurs. Ainsi, Naturalia est passé d’une promesse de faire connaître le bio, à celle de le démocratiser ; tout cela, pour répondre au mieux aux évolutions de la société sur le sujet du bio.

 

 

 

2. Identité visuelle forte, en contraste avec son environnement

 

Les tiers-lieux sont des espaces d’ouverture architecturale, culturelle, esthétique et artistique… Ils participent donc à sortir des logiques d’uniformisation du territoire qui peuvent être entreprises par les acteurs de l’État.

 

Dans leur engagement à proposer des alternatives, il est important pour eux de trouver des points de différenciation avec les acteurs locaux plus traditionnels.

 

Par exemple, L’Alternateur de la Vallée de l’Hérault a développé tout un système visuel autour de deux couleurs néons, qui dénotent très clairement du genre de couleurs habituellement utilisées pour les acteurs des réseaux locaux et régionaux. À cela s’ajoute des typographies plus décoratives, au-delà de leur aspect simplement informationnel.

 

Quel enseignement pour les marques ?

De la même manière que les tiers-lieux tentent de se démarquer à travers leur identité visuelle, les marques peuvent s’en inspirer pour émerger au sein de leur catégorie et face à leurs concurrents.

 

Souvent, les marques décident d’adopter les codes de leur marché pour ne pas égarer leur cible et s’intégrer prudemment.

Mais il peut être judicieux de créer un véritable univers visuel disruptif dans certains cas, notamment pour émerger sur un marché saturé, ou pour se démarquer en tant que jeune marque.

 

Tyrrells l’a très bien compris. La marque décide de s’affranchir des codes du marché des chips en proposant une identité visuelle ancrée dans le « terroir posh » britannique, et en montrant peu le produit fini pour se focaliser sur l’univers de la marque. Résultat : la marque est aujourd’hui l’une des leaders sur la chips haut de gamme.

 

 

3. RSE : un engagement à co-construire avec son audience

 

Comme nous l’avons vu, les tiers-lieux sont des espaces qui portent fièrement la valeur de co-création avec leurs publics. Ces lieux naissent de leurs besoins directs, tout en s’engageant à les impliquer à chaque étape du projet : idéation des solutions, fabrication, animation…

 

Une manière nouvelle de penser une méthodologie plus horizontale, où les publics – considérés comme des communautés – sont intégrés à la genèse du projet, et ne sont plus uniquement impliqués à la toute fin du processus.

 

La REcyclerie est un projet grandement intéressé par cette notion de co-création, à travers une vocation à responsabiliser autour des questions écologiques. Mais au-delà d’une démarche d’éducation, la REcyclerie souhaite favoriser les initiatives collaboratives pour permettre à chacun de trouver sa place dans ce combat. Par exemple, le lieu propose à la fois des ateliers Fresque du Climat pour sensibiliser au changement climatique… et dans un même temps, il propose à ses visiteurs de les former en tant qu’animateur sur ce même atelier !

 

Quel enseignement pour les marques ?

La co-création est un enjeu majeur pour les marques, qui doivent se réapproprier eux aussi la volonté d’implication grandissante des consommateurs. Certaines marques ont déjà réfléchi à cette question et ont implémenté des stratégies de réintégration de leurs communautés, notamment dans leur processus d’innovation.

 

Mais co-création ne rime pas uniquement avec co-innovation ! C’est Qui Le Patron ?! (La Marque du Consommateur) a bien compris que pour engager sa cible, bien d’autres leviers peuvent être activés.

La marque propose à quiconque de devenir sociétaire de la coopérative pour un euro symbolique, et ainsi pouvoir participer à toutes les prises de décisions : voter le cahier des charges de produits, fixer le prix de vente, participer aux visites de vérification du bon suivi des cahiers des charges…

 

4. Des expériences plus holistiques et qui durent dans le temps

 

Enfin, les tiers-lieux sont des espaces qui existent entre l’espace de vie et l’espace de travail. Ils concentrent donc en eux toute une richesse d’expériences : activités culturelles, sportives, expositions, débats et discussions, restauration, espaces de coworking, etc.

 

Ils envisagent toutes les étapes de la vie de leurs visiteurs, afin de proposer une activité à chacune d’entre elles.

Dans un même temps, ils réfléchissent également à la cohérence de l’expérience dans sa globalité, c’est-à-dire qu’un tiers-lieu engagé dans la lutte contre le gaspillage alimentaire va tendre vers le maximum d’autonomie en termes de sourcing pour son espace de restauration.

 

Les Halles de la Cartoucherie sont un bon exemple de lieu hybride ayant réussi à diversifier leurs activités, tout en gardant les halles de stands de restauration au cœur de l’expérience. Le lieu réunit trois autres pôles à celui de la gastronomie – la santé et le sport, la culture, et le co-working – qui ont pour but de proposer des activités complémentaires.

 

Quel enseignement pour les marques ?

On le sait : les marques cherchent aujourd’hui à s’ancrer dans l’esprit de leurs consommateurs et à créer des connexions plus profondes avec eux, au-delà de la simple expérience d’achat.

À terme, l’objectif est de favoriser de la préférence de marque et de la fidélité.

 

Monoprix a déjà entrepris cette démarche de diversification de ses services, notamment sur son flagship à Montparnasse. Sa Place Publique invite les visiteurs à prendre part à des ateliers, workshops et autres activités pour augmenter le trafic, et le temps passé en magasin.

Au-delà des expériences physiques, Monoprix se pose aussi la question des expériences phygitales en ayant récemment proposé des corners dédiés aux NFTs en magasin.

 

Conclusion

Au premier abord, on pourrait croire que les marques ont peu à apprendre d’espaces qui « sont sans être », puisqu’ils sont constamment en mouvement, fluctuants, instables… Et a contrario, la perception de la marque comme une entité relativement immuable a encore la vie dure.

 

Pourtant, ils sont la preuve qu’en ayant une vision très ambitieuse, ancrée dans le long-terme, et qui se laisse l’opportunité d’évoluer naturellement, il est possible pour les marques de rester cohérentes sur leur proposition de valeur tout en faisant des choix différenciants et en s’investissant sur de multiples secteurs, activités, métiers, engagements…

 

In fine, les marques doivent s’inspirer des tiers-lieux pour passer d’enseignes purement commerciales à des entités créatrices de lien, et ainsi aller au-delà de l’expérience retail traditionnelle.

 

De quoi inspirer les marques à devenir plus flexibles !

 

Gaetan Peret, Strategic Planner Assistant

1920 1280 France